Le Fourmilier

LE FOURMILIER

Le 3 janvier 2024

Quand arrive la fin d’été, le débit des cours d’eau s’affaiblit. Ce phénomène naturel appelé “étiage” est fortement amplifié par les activités humaines directes (alimentation en eau potable, irrigation agricole) et indirectes (sécheresses déclenchées par le réchauffement climatique).

Dans certains cours d’eau, l’eau ne s’écoule plus du tout : on appelle cela un “assec“.

L'assèchement estival

des cours d'eau en France

river

Cet article fait partie d’une série sur l’état de nos rivières, à lire dans l’ordre que tu veux.

  1. Les bassins versants
  2. L’assèchement estival des cours d’eau
  3. Alerte obstacles dans les rivières françaises
  4. Les prélèvements d’eau dans les rivières

Les assecs ont 2 grandes conséquences :

  • Pour les humains : des risques sur l’approvisionnement en eau douce pour nos activités (boire, irriguer, produire de l’électricité), et donc des conflits liés à la répartition entre les usages
  • Pour la biodiversité, et donc à terme pour les humains : des assecs répétés détruisent la végétation et font disparaître les zones de reproduction des poissons, déjà malmenés par les aménagements le long des rivières. Ils empêchent également l’arrivée de sédiments sur les littoraux.

Ces conséquences sont d’abord locales, mais peuvent se propager en aval sur le bassin versant (tu sais ce que c’est maintenant, grâce à cet article).

Pour comprendre et anticiper ces phénomènes, des milliers d’observations sont réalisées chaque mois, partout en France, par l’Observatoire National Des Etiages (O.N.D.E) et sont consignées scrupuleusement depuis 10 ans.

Le Fourmilier a fouillé dans cette base de données et voici ce qu’il en sort :

Ce graphique permet de visualiser depuis 2012, l'état moyen des cours d'eau en France chaque mois. Plus c'est rouge, plus on a de rivières à sec. Plus c'est bleu, plus ça coule.

On observe depuis 10 ans une intensification du phénomène d'étiage. De plus en plus de cours d'eau sont touchés : en août 2022, 35% des rivières observées étaient à sec !

... mais également, la période d'étiage s'allonge : elle a duré 5 mois en 2017 et en 2022.

Presque tous les départements connaissent des assecs

On va s’intéresser à cette fameuse période 2017-2023, où le phénomène s’est emballé, en zoomant sur les mois d’été et de début d’automne : traçons une carte.

Voici les départements qui ont la plus grande proportion de rivières à sec lors des mois de juillet à octobre.

On a représenté en noir les cours d'eau, pour visualiser les bassins versants les plus touchés.

En premier lieu, le bassin du Rhône, alimenté par les rivières des Alpes.
De nombreux cours d'eau sont à sec en Isère et la presse régionale s'en fait l'écho.


18 juillet 2023 - Lyon Capitale

Au niveau de Tours, la Loire peut presque se traverser à pied à cause de nombreux cours d'eau à sec en amont dans le bassin Loire-Allier.


6 octobre 2023 - Ouest France

Le nord de la France n'est pas épargné, avec de nombreuses rivières de l'Oise à sec. Son affluent, l'Aisne, n'est pas au top de sa forme non plus.


28 août 2023 - Le Parisien

Enfin, la Vendée est méga-touchée. La Sèvre Niortaise est en situation de "crise", et de nombreuses restrictions d'eau sont en vigueur.


9 août 2022 - Ouest France

On se situe ici dans une zone de tensions autour de l'eau avec les confrontations sur les projets de mégabassines.

Tu peux explorer la carte pour voir comment ça se présente autour de chez toi.

Chaque mois, plus de 3000 cours d’eau sont contrôlés en France par l’institut O.N.D.E.

Cette démarche est indispensable pour comprendre les impacts de ces étiages allongés et répétés sur la biodiversité, et permettre d’anticiper et d’ajuster la gestion des situations de sécheresses (restrictions d’eau, etc).

Comment faire face aux assecs ?

Le plan n°1 c’est bien sûr de lutter contre le réchauffement climatique, mais de toute façon il existe déjà et il faut composer avec.

Le plan n°2, c’est l’adaptation :

  1. Nous devons faire en sorte que les sols récupèrent plus d’eau. L’artificialisation des sols (article dédié ici) empêche l’eau de pluie de s’infiltrer dans les nappes, et la conduit plus vite vers la mer. Il faut ralentir ce phénomène et végétaliser beaucoup plus les villes et les abords des fleuves.
  2. Nous devons questionner plus fortement les prélèvements d’eau (article ici) réalisés dans les rivières, que ce soit à destination de l’agriculture, de l’industrie, des canaux, des particuliers… Certaines cultures intensives sont très gourmandes en eau : par exemple le maïs, qui sert principalement à l’élevage et à l’exportation, consomme 25% de l’eau en France. Il faut se tourner vers d’autres types de cultures.